Entretien avec Bruno Collard
A l'heure des Thés, un petit salon de thé au coeur de Perpignan, les photos de Bruno Collard étaient exposées dans le cadre du festival VISA off. Autour de moi, le paysage catalan, à toute heure de la journée et de la nuit. Coullioure, son allure médiévale et pittoreque, ainsi que sa marée vaporeuse. Le Canigou, mont bercé par l'éclat de l'Aurore. Un refuge en montagne sous des étoiles scintillantes, dormant dans un ciel dégradé : à la fois marine et orangé...Des photos qui vous font (re)tomber amoureux(ses) de la nature ! Immédiatement j'ai donc laissé un petit mot dans le livre d'or et mes coordonnées pour une interview.
Ce pompier m'avait conviée à son inauguration, puis je l'ai invité à discuter de son travail autour d'un café.
Nous nous sommes retrouvés au Café du commerce, à côté du Columbus Café. Les serveuses s'activaient à côté de nous pour ranger tables et chaises. Beaucoup de bruit nous entoure : celui du crissement, du fracas, du murmure, des paroles des autres clients...Peu de lumière nous éclaire. Je commence à le questionner sur les raisons qui l'ont poussé à présenter son travail, pas très journalistique.
C'était quand même un festival de journalisme, alors pourquoi un hors sujet?
Il le savait bien, mais il a postulé pour "le thème libre" pour avoir un avis des "gens extérieurs".
Il ne s'attendait pas à être pris pour le VISA off, ce n'était pas son but. Il a proposé une série de paysages. Il a été "surpris".
Est-ce le travail des formes et des couleurs que vous recherchez? "Je dirais pas ça" Il préfère travailler en pause longue et sur les effets, mais il n'a pas encore réussi à faire les photos qu'il voulait. Il varie les focales, ça dépend de la lumière, de la pause, du filtre, de la lumière...4-5 en nuit, pour photographier les étoiles, durant 45 minutes. Les objectifs sont variés.
Je lui demande ensuite : "Pourquoi ne pas retoucher vos photos ?"
"Si je la trouve trop sombre, je la retouche", mais il les retouche peu. Les effets sont plutôt obtenus grâce aux filtres qu'il place devant l'objectif. Mais il fait développer ses photos par un laboratoire, il n'a pas le matériel chez lui. Pour autant, s'inspire-t-il de photographes célèbres ? Pas vraiment, a-t-il répondu honnêtement. "J'ai un pote qui est photographe, Fred Revel." Remy Michelin et lui ont fait une photo par jour en pays catalan.
Bruno Collard aime aussi Vincent Munier, grand photographe animalier.
Lui-même part dans la nature, avec son appareil photo sous le bras. "Généralement, je vais souvent au même endroit", puis il "va voir autre chose". Le département est un cadre idyllique pour un photographe.
Essaye-t-il de transmettre un regard, un message sur le monde? Il ne s'est jamais posé la question. "En fait, il y a un peu plus d'un an, j'ai décidé de mettre une photo par jour sur Facebook... Et puis, j'ai arrêté." Il n'arrivait pas à poster LA photo qui lui conviendrait. La photographie est, pour lui, plus une recherche personnelle et intérieure, qui lui permet d'évacuer. Elle n'est pas un moyen de transmettre un regard ou une vision du monde. "J'essaye plus de me faire plaisir, plus je me fais plaisir plus ça fait plaisir aux autres." Peut-être que c'est justement la base de l'Art, tant ignorée et rejetée à notre époque. Vous avez déjà réalisé une analyse de texte/d'image dans laquelle vous pouviez ouvertement exposer votre plaisir/dégoût ? Pourtant, l'affect est l'une des base qui nous motive à vouloir savoir et comprendre. S'il n'y avait pas désir de connaissances, y aurait-il seulement connaissance ? (vous avez quatre heures).
Depuis son exposition, il dit s'être beaucoup amélioré.
Projets pour 2015? "Je suis comme un auteur devant sa page blanche...Est-ce que je pars dans les reportages pour faire le thème du VISA (...) ou dans la nature ?"
Et quel type de reportage ? "Sur les pêcheurs, en mer...Et on m'a proposé de faire un reportage sur l'enseignement des sourds et muets. J'ai une amie qui y travaille"
Quel est votre parcours ? "J'étais en classe aménagée sport études, natation" Il a fait la licence du STAPS (sport) de Font-Romeu, pour devenir professeur, et lors d'un stage, il s'est aperçu qu'il voulait devenir pompier. La photographie n'était pas une passion, il l'a découverte il y a quatre ans. Il a acheté un appareil photo, il a montré ses photos à la famille. "Je suis pas du genre à rester sur un échec" : il a acheté le matériel et a présenté ses productions au VISA. D'autres passions ? La pêche, qui lui permet de lui vider la tête. Il aime pêcher la truite, la pêche à la mouche. Il n'est pas un pêcheur qui se pose au bord du lac, avec son pack de bière (ah, les bons vieux clichés...).
A ce moment, un guitariste débarque et entame quelques chansons.
Je lui demande s'il est amoureux de la nature ? Oui, "ça ne me dérange pas de me lever très tôt pour aller me balader..."
Il est parti un mois en Australie, et en Nouvelle-Zélande, mais n'a pas pris de photo. En fond sonore, sa parole est accompagnée par La foule d'Edith Piaf, à la guitare.
Il est allé au Mexique, à Cuba, aux Seychelles. Il en a faites aux Seychelles.
Vous comptez refaire des expos ? "J'aimerai bien (...) je ne sais pas où aller".
"Sur cette expo à VISA, mon expo a eu beaucoup de succès car j'ai eu beaucoup de succès".
Je commente son ouvrage, qui n'était pas seulement "de belles photos", mais un travail esthétique, et recherché. Un cadre avait déjà été acheté à l'heure des thés, où il exposait. "Je ne me considère pas comme quelqu'un qui a du talent là-dedans (...) c'est juste du travail. Il y a beaucoup de photographes plus talentueux (...) je cherche pas non plus à en vivre. Je sais pas."
Peu d'artistes vivent ou peuvent vivre de leur travail. "Il y en a qui aimerait bien (...) mais moi, après, j'ai la chance d'être fonctionnaire".
Nous donnons nos fonds de poches aux artistes qui nous ont accompagnés. Comment concilier passion et vie privée ? "Sur les temps de la garde ou en sortant du travail (...) il y a un collègue à moi qui a fait une exposition sur l'autisme. Il a eu les félicitations du jury".
Il n'a pas de livre de chevet, mais il a pas mal lu Paulo Coehlo. "On m'a offert une fois L'alchimiste".
Il aime beaucoup travail sur les cervidés. Qu'est-ce que vous recherchez à faire ressortir chez la bête : l'animalité ou son harmonie avec la nature ? Plutôt l'harmonie, il recherche "quelque chose de joli", notamment sur le brame du cerf. Il recherche avant tout l'originalité. "J'ai passé dix jours en montagne pour les cerfs".
Quel est votre plat et votre restaurant préféré ? "Je suis un très grand gourmand" Le gratin d'aubergine, mais son restaurant préféré est "L'heure des thés...j'ai mangé là-bas et je me suis régalé!"
Sa page facebook, sur laquelle vous pourrez commander son calendrier : https://www.facebook.com/pages/Bruno-Collard-Photographe/116269271806523?sk=photos_stream
Son site internet : http://www.bruno-collard.com/
Ce texte a été relu et corrigé par Magdeleine Goutierre